Sabiha Gökçen, une grande figure de l’aviation turque et mondiale


Sabiha Gökçen est une pilote de guerre turque, devenue une figure emblématique de l’aviation militaire turque et mondiale. Pour beaucoup, elle représente également un symbole de l’émancipation de la femme turque.

Elle est née le 21 mars 1913 à Bursa. Elle a perdu ses parents (Mustafa İzzet bey et Hayriye hanım) pendant la Première Guerre Mondiale. Ils étaient d’origine bosniaque. Orpheline très jeune, elle a été élevée par son grand frère mais connaît des conditions de vie très difficiles. Elle grandit dans un contexte historique très particulier qui va dessiner les fondations de la Turquie moderne : entre mai 1919 et octobre 1922 se déroule la guerre d’indépendance turque (Kurtuluş Savaşı), menée par la résistance nationaliste turque dirigée par Mustafa Kemal, à l’issue de laquelle le traité de Sèvres (août 1920) est révisé et remplacé par le traité de Lausanne (juillet 1923). Ainsi, la République de Turquie est proclamée le 23 octobre 1923 avec Mustafa Kemal qui devient le premier président turc.

Une rencontre va changer la vie de Sabiha. En 1925, Mustafa Kemal est de passage dans la ville de Bursa. Sabiha a alors 12 ans. Elle réussit à avoir une entrevue avec le président. Elle lui explique qu’elle veut continuer ses études dans un internat, certainement pour ne plus être à la charge de son frère. Mustafa Kemal attendri par Sabiha l’adopte avec l’autorisation de son frère. Sabiha devient l’une des 8 enfants adoptés par Mustafa Kemal (7 filles et 1 garçon). Elle poursuit donc ses études au collège Çankaya à Ankara puis au lycée d’Üsküdar pour filles à Istanbul.

Le 19 décembre 1934, avec l’entrée en vigueur de la loi sur les noms de famille, Mustafa Kemal reçoit le nom d’Atatürk (« Père de la Nation » ou « Père des Turcs ») par l’Assemblée. A son tour, Mustafa Kemal Atatürk donne un nom à sa fille adoptive qui est Gökçen. Le mot « gök » en turc signifie « le ciel », et Gökçen « appartenir au ciel ». Elle n’est pas encore aviatrice à cette époque, mais tout semble la prédestiner... C’est également en 1934 que le droit de vote est accordé aux femmes. 



Mustafa Kemal Atatürk, dans sa volonté de modernisation du pays, fait de l’aviation militaire et civile une priorité. En 1935, il crée l’école d’aviation civile Türk Kuşu (« l’Oiseau turc »). Sabiha Gökçen assiste à la cérémonie d’inauguration de l’école. Elle est impressionnée par les démonstrations aériennes. C’est alors qu’Atatürk lui suggère de devenir aviatrice ce qu’elle accepte avec joie. Elle est la seule élève féminine à être inscrite dans cette école. Elle obtient son permis de pilote puis elle est envoyée en Union Soviétique avec 8 autres personnes pour parfaire sa formation. Au début de l’année 1936, Atatürk lui demande de rejoindre l’Académie de l’armée de l’air turque pour y suivre une formation au combat. Elle devient ainsi l'une des premières femmes au monde à avoir piloté un avion de chasse (Marie Marvingt ayant piloté un avion de chasse pour la première fois en 1915). Sabiha Gökçen est reconnue comme étant la première femme turque pilote de guerre, ce qui fait la fierté de Mustafa Kemal Atatürk. Elle devient un symbole de la modernité de la femme turque. Elle participe à plusieurs missions, notamment à l’opération de répression de Dersim (province kurde de Tunceli) qui s’était rebellée contre le pouvoir d’Ankara en 1937 et à une mission de paix autour des Balkans en 1938. La même année, elle retourne à l’école de la Türk Kuşu mais en tant qu’enseignante. Elle va y servir jusqu’en 1955 et va entraîner 4 femmes pilotes d’avion.

Elle effectue son dernier vol en 1996, aux côtés de Daniel Acton, à bord d’un Falcon 2000. A la fin de sa carrière, elle totalise plus de 8000 heures de vol. Cette même année, elle est désignée comme l’une des 20 pilotes les plus reconnus dans l’histoire de l’aviation à la Maxwell Air Force Base aux Etats-Unis pendant la cérémonie de remise de diplôme des étudiants de cette école. Elle est la seule pilote femme à avoir reçu ce prix. Pour lui rendre hommage, son nom a été donné à un des aéroports d’Istanbul inauguré en 2001. Quelques mois plus tard, le 22 mars 2001, elle meurt à Ankara à l’âge de 88 ans. Elle a été une source d’inspiration pour de nombreuses femmes pilotes. En 2002, la Fédération aéronautique internationale a créé la médaille Sabiha Gökçen qui est décernée « aux femmes qui ont accompli des exploits remarquables dans les sports aériens ». 

Sumeyye

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