Le prince Mohammed ben Salmane, entre progressisme et autoritarisme
Mohammed
ben Salmane, prince héritier d’Arabie Saoudite, devrait se rendre
bientôt à l’Elysée pour rencontrer Emmanuel Macron. Le
nouvel homme fort d’Arabie Saoudite suscite de nombreuses
interrogations. En effet, s’il lance des réformes présentées
comme progressistes, il fait aussi preuve d’autoritarisme, à
travers des démonstrations de force à l’intérieur du pays mais
aussi à l’étranger.
L’ascension du jeune prince de 32 ans a été fulgurante. Fils
préféré du roi actuel, Salmane ben Abdelaziz, il passe au premier
plan de la vie politique de son pays lorsque son père monte sur le
trône en 2015. Celui qui est aussi appelé « MBS » dans
les milieux diplomatiques est désigné comme le
nouveau prince héritier en juin dernier, à la place du neveu du
roi Mohammed ben Sayef. Le prince héritier accroît assez rapidement
son pouvoir. Ainsi, il cumule aujourd’hui les postes de
vice-Premier ministre, ministre de la Défense, conseiller spécial
du roi ainsi que celui de président du Conseil des affaires
économiques et du développement, qui gère une grande partie du
ministère de l’Economie.
Le
prince Mohammed ben Salmane s’attaque à la corruption dans son pays.
Ainsi, le 4 novembre 2017, à la tête d’une commission
anti-corruption, il déclenche une purge importante amenant au limogeage et à
l’arrestation de princes, de ministres et d’hommes d’affaires.
Ceux-ci sont gardés à l’hôtel Ritz-Carlton de Riyad, transformé
en prison, et sont libérés contre des sommes importantes. Ainsi, le
prince Mitab ben Abdallah a dû verser 1 milliard de dollars mais
aussi céder les rênes de la Garde nationale. Cette opération a
permis au royaume de récupérer une
centaine de milliards de dollars mais aussi au prince de
renforcer son pouvoir. Toutefois, si le prince affirme vouloir lutter
contre la corruption, l’enrichissement personnel et le gaspillage,
cela ne l’empêche pas de s’offrir quelques petits plaisirs. En
effet, en 2015, le prince s’est acheté un yacht pour 500 millions
d’euros. Il s’offre
la même année un château à Louveciennes, à l’ouest de
Paris, pour 275 millions d’euros.
Le
fils du roi se charge de moderniser le royaume et de sauver son
économie, menacée par la chute du prix du pétrole. Son ambitieux
projet, baptisé « Vision
2030 », prévoit de réduire la dépendance du royaume à
l’or noir, en se tournant vers d’autres secteurs d’activité
comme le numérique ou en s’attaquant au poids d’une fonction
publique omniprésente. Le projet repose sur la
mise sur le marché de 5 % de Aramco, la grande compagnie
nationale d’hydrocarbures. La réduction du nombre de
fonctionnaires et de leurs avantages ainsi que la mise sur le marché
de Aramco provoquent un certain mécontentement, ce qui pousse le
projet à être sans cesse reporté.
Sous
l’impulsion de MBS, les réformes sociétales s’enchaînent aussi
à une grande vitesse. Un
décret royal autorisant les femmes à conduire a été annoncé en
septembre et devrait entrer en vigueur en juin de cette année.
La muttawa, police religieuse, chargée de veiller, entre
autres, à la ségrégation des sexes dans l’espace public, a été
privée de son pouvoir d’arrestation. MBS
doit veiller cependant à composer avec les oulémas wahhabites,
autorités religieuses incontournables, afin de ne pas se les mettre
à dos.
Concernant la politique
étrangère, le prince s’oppose ouvertement à l’Iran. L’Arabie Saoudite et l’Iran sont les acteurs principaux d’une
guerre froide qui se joue au Moyen-Orient et luttent pour
l’hégémonie dans la région. Il a engagé son pays dans les
conflits
au Yémen ainsi qu’en
Syrie et a entamé un
bras de fer avec le Qatar. Ces interventions se sont avérées
être des échecs. Sa seule réussite est sans doute d’avoir réussi
à obtenir le soutien
de Donald Trump contre l’Iran … Mais est-ce une vraie
réussite d’avoir Trump comme seul réel appui ?
P.S.
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