Hommage à un styliste tunisien de renom : Azzedine Alaïa

En cette nuit du 18 novembre 2017, le monde de la mode pleurait la disparition d'une grande figure. 
Azzedine Alaia est décédé à l'âge de 77 ans des suites d'une chute qui lui a valu une hospitalisation d'une dizaine de jours. Sur Raina, nous n'avons pas l'habitude de vous parler show-business mais vous comprendrez vite pourquoi ce personnage atypique méritait qu'on vous le fasse découvrir. 



Alaïa c'est avant tout un talent tunisien qui s'est brillamment exporté en France dans un domaine que l'on sait impitoyable : la mode. C'est une success story digne d'un roman ou d'un film. C'est une fierté contemporaine pour la Tunisie, pour la France, pour l'interculturalisme. 

Collection été 2017-alaia.fr
Une enfance tunisienne

Azzedine  Alaïa aurait vu le jour un 26 février 1940, en Tunisie. Il est issu de parents agriculteurs dont le mariage n'a finalement pas fonctionné. Il est élevé par sa grand-mère dans une grande liberté ce qui lui vaut une "enfance heureuse" (de ses propres mots). C'est d'elle qu'il tiendra tout au long de sa vie son goût pour les grandes et belles tables. Il a aussi un goût prononcé pour le cinéma qu'il tient de son grand-père maternel. Il fréquente assidûment le cinéma Ciné Soir de Tunis. A l'école, il raconte les films ou chante les chansons entendues au ciné durant le week-end à ses camarades, en échange de crayons de couleur. Bien plus tard, il appellera d'ailleurs son chat "Oum" en hommage à la grande chanteuse égyptienne Oum Kalthoum. A 15 ans, après avoir menti sur son âge, il intègre les Beaux Arts de Tunis où il apprendra la sculpture et dont il sortira diplômé. 




Les premiers pas vers la mode 

Collection été 2017-alaia.fr
C'est sans doute de cette formation initiale que lui vint son goût pour les vêtements sculptants, très près du corps des femmes. Le métier de couturier, il l'aurait appris aux côtés de sa sœur Hafida. Il a en effet travaillé pour elle en parallèle de ses études pour l'aider sur les finitions de ses travaux. Ainsi, Alaïa commence à être sollicité par ses voisines puis par les dames des grandes familles tunisiennes pour confectionner des imitations de pièces de haute-couture de chez Dior ou Balmain. Une succession heureuse de rencontres féminines lui vaudra de percer dans le milieu. 









L'arrivée en France 

Collection hiver 2016-alaia.fr
Alors qu'il a le souvenir d'une enfance heureuse dans un pays sous tutelle de la France, où les gens sont mélangés (d'après son propre récit) et qu'il ne ressent pas le racisme ;  son arrivée en France, en 1957, est plus difficile. Cela s'explique par le contexte de l'indépendance toute fraiche de l'Algérie. Pas évident donc pour un jeune maghrébin d'origine populaire d'arriver dans l'Hexagone à ce moment précis. Durant les premières années il vit gracieusement dans une chambre de bonne en échange de petits travaux, pour le compte d'une dame issue de l'ancienne noblesse française. Il décroche un travail chez Dior mais n'y restera qu'entre trois et cinq jours selon les sources. La raison ?  Il était étranger, sans papiers. Cet épisode restera anecdotique puisque les rencontres qui le menèrent à la consécration ont continué. 



Collection hiver 2016-alaia.fr 

Collection hiver 2016-alaia.fr
Collection hiver 2016-alaia.fr













Son oeuvre 

Il travailla tout au long de sa carrière avec différentes grandes marques, avant de travailler à son propre compte sous le sigle portant son nom, comme le lui avait conseillé son ami Thierry Mugler. Son talent est tel qu'il parvint à se faire un nom à l'international, sans jamais tenir compte du calendrier conventionnel de la haute-couture parisienne. Ses collections sortaient quand elles étaient prêtes et il organisait ses défilés de manière très privée, souvent une semaine après la Fashion Week. Alaïa était quelqu'un de très discret qui ne répondait que très peu aux interviews et ne faisait jamais la promotion de ses événements. Son dernier défilé a eu lieu en mai dernier. Des personnalités aussi diverses que variées y ont assisté telles que Jamel Debbouze (qui parle du créateur comme d'un "cousin"), ou encore l'actrice Leïla Bekhti. On y qualifiait le travail de l'artiste d'"indémodable" et immédiatement reconnaissable par sa singularité. Il y avait dans cette dernière collection un côté très années 1970. Les longueurs des robes, leurs formes et textures sont variables mais le tout est toujours très classe, décent, ni trop court, ni trop décolleté. La transparence se veut chic et pas sexy quand elle existe sur une pièce. On ne retiendra pas l'héritage d'Alaïa comme visionnaire. Mais c'est ce personnage complètement hors normes qui mérite d'être connu au-delà du seul monde de la haute-couture. Preuve qu'un étranger peut arriver en France avec tout son talent et se faire un nom sans devoir se conformer aux règles pré établies par la culture du milieu dans lequel il souhaite percer. 

AK

Sources pour découvrir plus en avant Azzedine Alaia : 

https://www.letemps.ch/lifestyle/2009/05/05/alaia-peau
https://www.youtube.com/watch?v=pDHrlpiUcmA
http://www.liberation.fr/france/2017/11/19/azzedine-alaia-l-art-et-la-matiere_1611050
https://fr.wikipedia.org/wiki/Azzedine_Alaïa#cite_note-independant-1994-5
http://www.lepoint.fr/mode-design/info-le-point-fr-azzedine-alaia-est-mort-18-11-2017-2173297_265.php

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